Brassage amateur : la dissolution du CO2 expliquée
Lors de la fabrication de bière, la fermentation alcoolique produit naturellement du dioxyde de carbone (CO₂). Ce gaz, essentiel à la sensation en bouche et à la mousse, se dissout partiellement dans le liquide. En brassage amateur, comprendre les facteurs qui influencent cette dissolution du CO₂ permet de mieux contrôler la carbonatation et d’obtenir un produit final plus stable et agréable.
La dissolution du CO₂ dépend principalement de la température, de la pression, et du temps. Lorsque ces variables sont maîtrisées, la bière peut se carbonater naturellement, évitant ainsi des étapes supplémentaires. Léon rappelle souvent que le CO₂ n’est pas un simple sous-produit, mais un ingrédient à part entière de la bière.
Équipement adapté à la gestion du CO2
Le brasseur amateur qui souhaite maîtriser la dissolution du CO₂ doit disposer d’un équipement adapté. La cuve de fermentation isobare, pressurisable, est indispensable pour retenir le gaz. L’ajout d’un manomètre, d’un joint étanche et idéalement d’une spunding valve (valve de décharge réglable) permet de contrôler précisément la pression dans le fermenteur.
Un seau plastique muni d’un barboteur ne permet pas de retenir la pression, et donc pas de stocker du CO₂ dans la bière. En revanche, un fermenteur en inox sous pression rend possible une fermentation isobarique : on y laisse monter la pression jusqu’à 1 ou 2 bars pour forcer la dissolution du CO₂.
Facteurs clés : température, pression, agitation du moût
Le CO₂ se dissout mieux à basse température. Par exemple, à 20 °C et à pression atmosphérique, une bière ne retiendra qu’environ 0,8 volumes de CO₂. À 10 °C, on atteint facilement 1,5 volumes. C’est pourquoi un refroidissement progressif en fin de fermentation augmente naturellement la dissolution du CO₂.
La pression agit de manière linéaire : plus elle est élevée, plus la bière peut contenir de CO₂. Une pression de 1 bar à 10 °C peut suffire à atteindre le niveau de carbonatation d’une ale anglaise. En revanche, pour une saison ou une pils bien pétillante, il faudra monter jusqu’à 2,5 volumes, voire plus, ce qui nécessitera une fermentation sous pression contrôlée.
Enfin, éviter l’agitation excessive pendant la fermentation ou le transfert est crucial : cela favorise le dégazage et diminue la dissolution du CO₂ déjà acquise.
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Tester la dissolution du CO2 à la maison
Il est tout à fait possible de mesurer ou d’estimer la dissolution du CO₂ dans sa bière maison. Une méthode simple consiste à prélever un échantillon, le refroidir à température de service (4–8 °C), le mettre dans une petite bouteille PET, la fermer et presser le flacon. Si la bouteille reste rigide après quelques jours au froid, c’est que la bière est bien carbonatée.
Pour les brasseurs plus avancés, on peut utiliser une échelle de carbonatation croisée (température + pression) pour estimer les volumes de CO₂ dissous. Certains brasseurs amateurs vont jusqu’à investir dans un manomètre différentiel (aphomètre) à visser sur une bouteille test pour suivre l’évolution de la pression et donc de la dissolution.
Léon conseille d’établir un petit carnet de tests en changeant un seul paramètre à chaque brassin : température de fermentation, type de levure, ou niveau de pression. Cela permet de mieux comprendre ce qui affecte réellement la dissolution du CO₂ dans sa bière.
Adapter la dissolution du CO2 à chaque style de bière
La dissolution du CO₂ ne doit pas être uniforme dans toutes les bières. Un stout à l’avoine demandera une carbonatation douce (1,8–2,0 volumes), tandis qu’une blanche belge ou une IPA moderne nécessitent souvent une carbonatation plus vive (2,5–2,8 volumes).
C’est pourquoi gérer cette dissolution du CO₂ dès la fermentation permet de personnaliser sa bière selon le style. En jouant sur la température de fin de fermentation, la fermeture progressive de la spunding valve et le timing du cold crash, le brasseur amateur peut ajuster finement la carbonatation sans avoir besoin d’ajouter de sucre à l’embouteillage.